Espagne mise à jour Mars 2023

12 mars 2023
Refuge

Dimanche 12 mars 2023

Hier, c'était l'anniversaire de Dirk et aujourd'hui, il y a exactement un mois que Léopold nous a été enlevé. Un mois de grande tristesse et un mois pendant lequel, malgré notre lourde perte, nous n'avons pas été épargnés par la misère. Un refuge surpeuplé et trop peu d'adoptions , ce qui implique un trajet avec une camionnette à moitié pleine pour le même prix d'essence et de péages . Les candidats à l'adoption qui, au lieu de remplir des demandes, envoient un mail demandant plus de photos et d'explications concernant tel ou tel chien(s) et une éventuelle visite aux chiens à De Pinte, un fléau des temps modernes... J’appelle au plus vite, les candidats qui font une demande d'adoption en règle.  Je les ai parfois au téléphone pendant une heure, pour écouter tous leurs témoignages pleins d’expertise sur la question et pour répondre à toutes leurs questions, ainsi que pour expliquer la procédure d'adoption. Après avoir annoncé  qu'ils sont prêts pour l'adoption, ils changent d'idée lors de la visite à domicile qui les attend (dont Mesi de 10 ans, a été victime), aujourd'hui aussi un fléau majeur... De vieux galgos qui sont abandonnés par leurs propriétaires après des années de bons et loyaux services car des frais pourraient être engagés, un autre fléau... Le tout avec peu de respect et un calvaire pour les responsables de régions et pour moi-même. C'est pourquoi je suis toujours ravie lorsqu'un adoptant de la première heure m'appelle. Récemment j'ai reçu un coup de téléphone d'un adoptant qui a adopté son premier chien en 1996 et qui m'a appelé pour son 6 ème ou 7 ème chien !! Grâce à Dieu, nous avons également des adoptants pareils. Des gens qui ont une foi inébranlable en GINB et qui nous défendent contre vents et marées contre les je-sais-tout et les calomniateurs, qui font également partie de notre lot quotidien… Un grand merci car sans vous il nous serait impossible de tenir le coup.  

Quoi qu'il en soit, après la mort de Leopold, j'étais si triste et inconsolable que Dirk a commencé à s'inquiéter et un soir, il a fini par dire  que j'avais besoin d'un autre chiot Barzoï pour me changer les idées. Loin de moi cette pensée et je ne voulais pas en entendre parler. Cependant, le destin en a décidé autrement en la personne d’un ami qui est récemment retourné en Galice, sa région natale.  Lorsque Dirk a parlé à cet ami qui est serveur au salon de dégustation où nous buvons notre café  depuis près de vingt ans, combien j'ai souffert de la mort de Léopold , l'homme a dit qu'il connaissait quelqu'un qui avait des Barzoïs dans sa région... Dirk a contacté l'homme à mon insu. A cette époque, il n'avait pas de chiots mais il donna à Dirk le nom d’une ukrainienne qui avait fui avec ses chiens à cause de la guerre et après une tournée à travers l'Espagne avait maintenant une résidence quelque part plus au sud. Suffisamment d'informations pour Dirk, pour pouvoir entamer des recherches et trouver ce qu'il cherchait à travers de nombreux détours. Cependant, le plus dur était encore à faire. Il devait réussir à me convaincre. J'ai tenu bon, je n'ai rien voulu entendre et j'ai dit que je ne voulais pas ou ne pouvais pas remplacer Léopold. Quoi qu'il en soit, Dirk était, aussi têtu que moi. Il n'arrêtait pas de pousser et d'essayer de me convaincre. En spéculant enfin sur ma conscience et en utilisant l'argument que je pouvais accueillir un ukrainien déplacé et aider le réfugié, il a finalement gagné et nous sommes passés devant  les champs d'orangers en entrant Valence, neuf jours après la mort de Léopold ...

Après une longue recherche, de nombreux appels téléphoniques au propriétaire des barzoïs et des allers-retours sous la pluie battante sur les routes étroites (trop étroites pour la camionnette et la circulation venant en sens inverse) la propriétaire nous attendait, est montée dans la camionnette et assise entre Dirk et moi sur le box frigo nous nous sommes rendus à un petit chalet en bois, un peu délabré, avec un terrain où courraient cinq grands barzoïs , dont un à trois pattes, et quelques chiots. Parmi eux, le futur Amadeus qui s'est avéré plus tard être le fils du chien avec une patte arrière amputée. Pendant que Dirk garait la camionnette, entouré des imposants chiens et des chiots, je marchais avec la propriétaire à travers les hautes herbes jusqu'au chalet car je devais aller d'urgence aux toilettes. À l'intérieur se trouvaient trois chiots minuscules dans un petit espace sombre qui servait également de chambre à coucher et la situation était encore plus triste qu'à l'extérieur. Pour la première fois, j'ai été confronté à quelqu'un qui avait fui la violence de la guerre et après une longue errance avec ses chiens avait trouvé un foyer dans un pays étranger. Des conditions épouvantables mais il faut dire que ses chiens étaient en bon état et recevaient la meilleure nourriture, avec tout le respect que je lui dois. Sur le mur en bois étaient accrochés quelques diplômes et trophées d'expositions internationales d'une vie passée. Quand je suis ressortie, Dirk a demandé "et, as-tu déjà vu le mâle ??" "Pas vraiment" répondis-je et j’ajoutai "mais il peut venir, il faut qu'il vienne". Après qu'elle nous ait préparé un café noir très fort et très nocif pour l'estomac" dans sa petite cuisine improvisée et que la question d’argent fut réglée, Dirk a porté le chiot avec les 4 noms et le pedigree ukrainien dans la camionnette et avant de partir, laissa sortir nos chiens qui nous avaient accompagné. Alors qu'ils étiraient leurs jambes et que je disais au revoir à la dame, la mère et le père du chiot, tous les deux à trois pattes, me sautèrent dessus comme s'ils me transféraient les soucis de leur fils. Pendant que nous entamions les 450 km du retour, j’ai dit à Dirk que j’allais l'appeler, "Amadeus" et j’ai ajouté cyniquement «  peut-être que son nom lui portera chance... »

Une fois rentrée, j'ai pris rendez-vous avec le docteur De Frutos.

Jeudi 23 février 2023

Il était 8 heures précises lorsque nous sommes partis avec, à bord, Amadeus et Beauregard  et 9 heures précises lorsque nous sommes arrivés à la clinique du docteur De Frutos qui a examiné méticuleusement Amadeus. Il a procédé à une prise de sang, fait des tests et a conclu qu'il était en parfaite santé et que tous ses vaccins, qu'il avait reçus d'un vétérinaire à Burgos, étaient en règle. Dans la salle de consultation adjacente, Beauregard a subi à peu près la même procédure, après quoi des radios ont été faites de ses organes vitaux. Quand Teresa est venue avec son rapport, j'ai tout de suite vu qu'il se passait quelque chose de grave. Quand elle a gentiment dit que les radios et les tests sanguins montraient qu'il souffrait d'une insuffisance rénale aiguë et qu'il était très malade, nous avons été choqués et j'ai éclaté en sanglots. Notre Beauregard toujours complaisant et discret une insuffisance rénale !!!  Teresa et Felipe De Frutos nous ont assuré que nous n’aurions pas pu prévoir , car la maladie ne se manifeste que lorsqu'il est trop tard. J'ai pensé à notre bull terrier Hercules qui en était mort alors qu'il avait à peine 6 ans. Beauregard, venait de chez les gitans alors qu'il était chiot avec ses 2 sœurs. Tous les trois souffraient de Parvo lorsqu'ils ont été largués et qu’ils ont été pris en charge par Casa Belgica. Ses sœurs sont mortes mais le petit frère, qui avait les plus beaux yeux et le plus beau regard que j'avais jamais vu, a survécu. Il a reçu 2 transfusions sanguines (Parfois, on disait en rigolant que le sang devait provenir d'un paresseux puisqu’il était très lent et qu'il était devenu si gros). Quoi qu'il en soit, il a vaincu la terrible maladie et il passa son enfance à Casa Belgica en compagnie d’Hercules,  également chiot à ce moment là et qui est devenu son meilleur ami. Ils sont restés avec nous jusqu’à la fin. J'avais encore tellement de peine à cause de la perte de Léopold et maintenant ceci. C’était trop à supporter et il m’était impossible de retenir mes larmes. Beauregard a dû être hospitalisé et Teresa nous tiendrait informés quotidiennement. Nous sommes donc revenus seuls avec Amadeus et avons laissé Beauregard derrière nous.

Après s’être battu pendant 5 jours, il a perdu son combat et nous avons dû le laisser partir le lundi 27 février, 15 jours après Léopold. Il avait 11 ans. Pour une si bonne âme, le ciel des chiens s'ouvrira tout grand et Léopold, son meilleur ami Hercules et tous ses autres frères et sœurs qui l'ont précédé, seront aux portes du ciel pour l'accueillir. Il va cruellement nous manquer.

Samedi 11 mars 2023

Retournons à présent à aujourd'hui, le jour de l'anniversaire de Dirk. Amadeus, notre nouveau colocataire intelligent, est déjà bien installé. Pendant la journée il s'amuse avec  Hannibal qui souffre de cécité (qui à ma grande joie et les larmes qui vont avec, a été adopté par de très gentils adoptants que nous connaissons bien) et bien sûr également avec « Godzilla » Loulou Babalou. Une fois les jeux terminés, il mange à satiété et la nuit il dort à côté de moi, tout comme le faisait Léopold. Lorsque pendant la journée, est fatigué des jeux, il se retire dans "sa" chambre, comme Léopold le faisait. Je sais que c'est impossible et c'est parce que j'aimerais bien, mais parfois c'est comme si une partie de Léopold était revenue en Amadeus. La façon philosophique dont il regarde tout, la façon dont il se comporte .. Alors qui sait peut-être .. Quoi qu'il en soit, le jour mémorable de l'anniversaire de Dirk, notre plus jeune progéniture commence à boiter et sa jambe gonfle énormément .. Quand Dirk essaie de faire fonctionner la patte,  il hurle de douleur. On suppose une entorse, alors il applique un pansement de soutien. Le lendemain c’est encore pire, alors j'envoie un mail au docteur De Frutos, qui me répond tard dans la nuit que nous sommes attendus le lendemain. Je suis soulagée car Amadeus est devenu apathique et il se lamente toute la journée. Je ne peux penser qu'à une chose : son père qui a été amputé d'une jambe à cause d'une inflammation et je dis à Dirk qu’il m’est impossible de gérer plus de drames.

Lorsque nous sommes chez le docteur De Frutos le lendemain et qu'il enlève le pansement, un gros jet de sang et de pus jaillit d'un trou d’un centimètre et demi de diamètre dans son coussinet plantaire, comme un volcan crachant de la lave. Le docteur De Frutos dit d’un air satisfait que le pire est passé car la lave a déjà brûlé une fistule . On lui prescrit beaucoup de médicaments et de soins et il doit partir pour la Belgique jeudi !! Dirk saura quoi faire. .

Mardi 14 mars 2023

Le soir à 23h30, Dirk arrive avec son copilote Dirk Beirnaert Buffalo et sa fille Paulien qui m’accompagnera pour le voyage du retour. Dès qu'ils se sont remis de l'accueil des quelques chiens, selon nos normes car les autres sont en pension depuis hier, ils n'ont plus qu'à subir celui de Loulou (qui n’est pas des moindres...), Hannibal, Hector, Astrid... et bien sûr d’ Amadeus. Dès qu'ils sont installés, je demande à Paulien, assistante vétérinaire, si elle veut aider le lendemain à nettoyer les dents des messieurs qui arrivent. Pour la deuxième fois, elle accepte car bien sûr Dirk le lui avait déjà demandé pendant le trajet de l'aéroport à Casa Belgica. Malgré l'heure tardive, nous continuons à discuter jusqu'après 1h du matin. La nuit est donc assez courte…

A 8h30, Marie-Carmen amène les messieurs pour un traitement dentaire et convient avec les invités qu'elle les attendra au refuge vers 16h. Paulien accomplit sa tâche de manière exemplaire et avec amour et vers midi les messieurs sont prêts et auront un sourire Pepsodent à montrer à leurs nouveaux propriétaires samedi.

Après un lunch tranquille et copieux, ils partent pour le refuge. Moi, je reste à la maison et pense au fait que la vie de Paulien  changera complètement après avoir vu le refuge et les nombreux chiens qui attendent désespérément un bon foyer .. Une heure et demi plus tard il s'avère que j'avais raison… Le soir on mange de la Pizza et les messieurs regardent le foot car AA GENT joue. Dirk tout comme sa femme Martine, sont des fans assidus du club gantois. Voilà pourquoi nous l’appelons Buffalo.

Jeudi 16 mars 2023

A 10 heures, les chiens sont chargés et nous disons au revoir aux chauffeurs qui partent avec, à bord, leur précieuse cargaison. Paulien et moi-même, devons attendre jusqu’à 13h avant d'être pris en charge par le taxi commandé. Après que nous ayons rendue la maison Spic et Span, Paulien a les mains pleines avec des tâches que Dirk lui a confiées et qu’il m’est impossible de faire moi-même. fermer les portes , activer l’alarme etc . Entre-temps, le chauffeur de taxi est arrivé . Parce que Dirk a oublié d’enlever la grille de séparation, elle ne parvient pas à fermer la véranda. Pendant qu'elle résout intelligemment l' oubli de Dirk, je dis au chauffeur qu'il y a une autre dame qui va nous rejoindre. Quelques minutes plus tard nous sommes toutes les deux à bord et le chauffeur nommé Jésus part en trompe pour l’aéroport. Paulien et moi-même passons les 50 prochaines minutes les fesses et les yeux serrés en espérant que nous arriverons vivantes à l'aéroport. Je dis à Paulien que c’est de loin le plus mauvais chauffeur qui  m’ait été de rencontrer.

A l'aéroport ce n'est pas beaucoup mieux, comme d'habitude, nous devons attendre et encore attendre l'assistance… Quand elle arrive enfin (après avoir exprimé mon mécontentement) nous avons enfin le temps pour parler tranquillement. Lorsque l'heure du départ approche, la même chose nous attend, l'assistante est en retard et ils ont déjà commencé à embarquer. Une vive discussion s'ensuit entre une dame coordinatrice qui ressemble à une poivrière qu'il est impossible de renverser et la ressortissante noire africaine qui pousse mon fauteuil roulant et qui, selon elle, doit attendre en dernier puisqu’elle n'était pas à l'heure. Discussion en présence d'une longue file de passagers à l'embarquement. Pas très professionnel tout ça. Même les hôtesses et le pilote viennent voir ce qui se passe.. Je suis la dernière à embarquer et Paulien et moi pouvons continuer nos conversations pendant les 2 prochaines heures. Il est plus de 20 heures lorsque notre chauffeur de taxi la dépose chez elle et me dépose à De Pinte un quart d'heure plus tard.

A 23h, j'appelle les messieurs pour dire que je vais me coucher. A 15h30, j’entends la clé dans la serrure car ils sont à la maison .. HEUREUsement !! Mais peu de temps après, Buffalo part en même temps que Dirk pour prendre le train de 9 heures et revenir cet après-midi avec Martine pour aider Kris Saenen à sortir les voyageurs et à les nourrir. Dirk part pour Rosa Canina récupérer la camionnette et pour la nettoyer et n'est de retour à la maison qu'après 14h pour faire quelques courses.. Baaaahh je hais de devoir faire des emplettes..

Samedi 18 mars 2023

Le jour de l'adoption ... tout se passe bien, beaucoup d’anciens fidèles qui adoptent un chien et bien sûr aussi de "nouveaux" adoptants .Parmi les  «  vétérans » se trouvent les adoptants qui viennent pour Hannibal et Mona, avec qui il a fait le voyage et passé la nuit ... Quand je le vois "se débattre" avec la laisse à travers la vitre, je sors et j'appelle son nom. Il est soulagé de m'entendre et se calme un peu mais il a toujours peur alors je demande  à Dirk de le guider vers l'intérieur. Mon cœur déborde et celui des adoptants également. Quand tout est prêt et après leur avoir donné des conseils précieux, ils se préparent à partir. Je suis trop émue et les larmes me coulent sur les joues. J'ai honte mais je n'y peux rien et je les rejoins afin de m’excuser. Hannibal et Mona sont allongés dans la voiture, comme des rois sur un couvre-lit en peluche. Quand je caresse une dernière fois la belle tête d'Hannibal, je reçois un coup de langue. Il semble me dire de ne pas m'inquiéter.. Une fois le jour d’adoption terminé, nous chantons tous ensemble pour tous ceux qui ont fêté leur anniversaire en février et en mars et nous mangeons des tas de Schtroumpfs Limbourgeois et des morceaux de tarte de Breugel… La semaine prochaine aura lieu la promenade de Balen…

Puis s’en suivra le retour en Espagne. Nous partirons un mardi… Je suis prête à subir le supplice…

Mireille